« Géant » des chemins de fer régionaux suisses, le BLS est aujourd’hui plus puissant que jamais avec, d’une part, le tunnel de base du Lötschberg, inauguré en 2017, et, d’autre part, la modernisation continuelle de son parc moteur et de ses infrastructures. Numéro un du transport de voyageurs dans le Mittelland, notamment dans l’agglomération bernoise, il gère aussi une branche fret très active jusque dans les pays limitrophes. Suite et fin de notre dossier commencé dans Rail Passion n° 240.
Le tunnel de base du Lötschberg renforce le BLS
Lors d’une votation le 27 septembre 1992, le peuple helvétique a adopté à 63,5 % le concept des NLFA (Nouvelles Lignes ferroviaires dans les Alpes) qui, grâce à leur profil de plaine, allaient permettre non seulement d’accélérer les relations voyageurs entre l’Allemagne, la Suisse alémanique, le Valais et l’Italie, mais aussi de favoriser le transit fret en développant le ferroutage pour désengorger le réseau routier. Il n’était plus question pour le pays de développer les autoroutes au profit des camions pour des raisons évidentes d’écologie. En 1998 également par référendum, le modèle de financement a également reçu l’aval de la population.
Commencés à la mi-1999, les travaux de forage du tunnel de base du Lötschberg, long de 34,580 km, avec deux tubes séparés, prévu à double voie entre Frutigen au nord et Rarogne au sud, avec jonction sur la ligne du Valais en amont de Visp, ont été menés dans un temps record. Toutefois, la Confédération, pour permettre un échelonnement budgétaire raisonnable, a découpé le projet en deux étapes :
– la première, entièrement réalisée, a concerné à la fois le forage du tube est totalement équipé, le forage du tube ouest équipé seulement de Raron à Ferden, avec gros œuvre terminé de Ferden à Mitholz, non excavé au-delà de Mitholz à Frutigen, le forage du raccordement ouest vers Steg jusqu’au portail de Niedergesteln ayant été effectué ;
– la seconde, pouvant être découpée en deux phases, avec achèvement du forage et pose des équipements de Ferden à Frutigen et réalisation du raccordement ouest vers Steg, La voie a donc été posée dans les deux tubes ouest et est sur 11,800 km du portail sud à Ferden, puis dans celui est de Ferden à Frutigen sur 22,780 km. Avec les raccordements à l’air libre au nord à Wengi et Frutigen et au sud à Rarogne, précédés d’un grand viaduc sur le Rhône, le projet approche un total de 40,200 km.
Terminés en avril 2005, les forages ont été suivis des équipements (voie, caténaires 15 kV, signalisation ECTS niveau 2, télécommunications et dispositifs de sécurité), puis des tests et des essais. À la faveur d’une marche à haute vitesse en janvier 2007, une rame ICE a parcouru l’ouvrage en 12 min, atteignant une pointe à 280 km/h, établissant ainsi un record absolu sur le réseau helvétique. Inauguré le 15 juin 2007 avec remise à BLS SA en tant qu’exploitant, il a été utilisé commercialement à compter du 9 décembre suivant avec une vitesse autorisée de 250 km/h pour les rames pendulaires, 200 pour les trains IC et 100 pour les convois de marchandises.
Aussitôt, la desserte voyageurs a été radicalement modifiée avec passage par le tunnel de base chaque heure d’un IC Romanshorn – Zurich – Berne – Brigue, alterné toutes les 2 heures avec un IC Bâle – Berne – Brigue, trois sillons étant suivis par des EC avec rames ETR 610 de Bâle à Milan. Ces circulations sans arrêt de Spiez à Visp et donnent à cette gare une correspondance à la fois vers Zermatt par le MGB et vers le Valais central (Sierre, Sion) par trains IR des CFF. Le gain de temps résultant de l’ouverture du tunnel de base, raccourcissant le trajet Spiez – Brigue de 12 km, est de l’ordre de 30 min. Il est nettement plus important pour la clientèle de Sierre, voire de Sion qui pour joindre Berne devait faire le détour soit par Brigue, soit par Lausanne.
En régime fret, des trains variés empruntent ce nouvel itinéraire court avec un gain pouvant atteindre 1 heure : route roulante accompagnée Allemagne – Italie de Fribourg à Novare, trafic combiné (conteneurs, caisses mobiles, semi-remorques), trafic diffus entre les grands triages de Mannheim, Bâle Muttenz, Zurich Limmatal, Domodossola II, Milan Smistamento (trains complets d’automobiles, d’argile, d’Allemagne sur l’Italie, de produits chimiques, etc.). Quelques trains de fret ont été conservés par la ligne de faîte historique, ainsi qu’une desserte régionale composée d’un train RE par heure Berne – Spiez – Kandersteg – Brigue. À l’usage, le tunnel, avec son tronçon de 22 km en voie unique, est utilisé à 80 % de sa capacité, voire à 100 %, obligeant à passer des trains de fret de même sens en batterie. 40 mois après son ouverture, le 100 000e train était décompté le 3 mars 2011. Actuellement, 110 sillons fret sont tracés par l’itinéraire du Lötschberg, dont les deux tiers par la ligne de base, s’ajoutant aux 50 mouvements voyageurs, les autres par celle de faîte notamment dans le sens Sud – Nord. Les plus lourds sont ceux d’argile d’Allemagne vers l’Italie, atteignant 3 250 t pour une longueur de 750 m.
La planète BLS aujourd’hui
En juin 2013, l’association Swiss Train a affrété deux trains spéciaux de Bâle à Kandersteg avec la machine électrique préservée Ae 6/8 208, pour célébrer les 100 ans de la ligne historique du Lötschberg. L’actuelle société BLS SA compte quelque 2 900 collaborateurs occupés au trafic voyageurs avec 132 gares et haltes (train, bateau et bus), au trafic fret (BLS Cargo SA avec branches Italia et Deutschland) (1), à l’infrastructure (BLS Netz), à la production ferroviaire, au management et au service.