Après bien des vicissitudes, la gare niçoise des Chemins de fer de la Provence, qui avait perdu sa fonction ferroviaire depuis la création d’une nouvelle gare, voit sa restauration s’achever avec le remontage de sa halle métallique. L’opération, qui s’insère dans un projet immobilier plus vaste qui devrait s’achever fin 2018, ne saurait satisfaire pleinement les partisans du rail, mais, au vu du sort que certains élus locaux réservaient aux CP en général et à cette gare en particulier, on peut estimer que l’on a échappé au pire !
À Nice, l’ancienne gare du Sud des Chemins de fer de la Provence (CP) a été magistralement restaurée pour être convertie en bibliothèque municipale (la bibliothèque Raoul-Mille), ouverte en janvier 2014. Le dernier acte de l’opération, qui s’est déroulée courant 2017, a été le remontage de la halle métallique (issue de l’Exposition universelle de Paris 1889, pavillon de la Russie et de l’Autriche-Hongrie), classée à l’Inventaire supplémentaire des monuments historiques en 2002, au même titre que le bâtiment, conçu par Prosper Bobin. Chaque pièce a été, au démontage, scrupuleusement numérotée (en vue de la remise en place) afin d’être traitée et repeinte. Ce démontage était rendu nécessaire pour réaliser, entre-temps, un parking souterrain de 750 places (dont 93 pour les maraîchers) sous cet emplacement.
Une petite fête municipale a été donnée le 10 juin 2017 pour l’inauguration. Une fête qui, outre l’ouverture au public de la halle, comprenait une animation pour enfants (petits manèges censés rappeler que ce parvis fut jadis un lieu festif), des musiciens provençaux, des discours et, le soir, un bal où des personnes en costumes d’époque étaient les vedettes du parvis de la gare. On se serait cru en 1892, le millésime du fronton aidant, ainsi que l’enseigne frontale originale : « Chemins de fer du sud de la France », retrouvée et qui en témoignait. Mais, hélas, de trains il n’y en avait point, hormis un petit stand improvisé des CP (dont la présence a dû être timidement autorisée) qui essayait d’assurer, et seulement le matin, la promotion du service public, toujours bien oublié ici.
Cela laisse donc une impression étrange : refaire les pas de jadis mais déboucher, par les accès aux quais, dans une halle pas tout à fait la même dans sa restitution, pour l’instant déserte de toute activité et, bien sûr, de rails, le sol étant bétonné et non terminé. On ressent un immense regret et un certain gâchis. Voici une gare que Jacques Médecin (ancien maire de la ville) a toujours souhaité raser, elle a donc été toujours laissée à l’abandon quand elle était active, les menaces perpétuelles sur la ligne y participant. Et maintenant qu’elle n’est plus en fonction, on mesure ce que cette remise en état aurait pu permettre du point de vue touristique si Alain Hervé, l’excellent directeur de l’époque, s’était permis de faire de la résistance en refusant de quitter les lieux. En honorant un contrat que les autres partenaires ont fait échouer, le réseau a été dépossédé de son patrimoine immobilier pour rien. Il faut rappeler que c’est dans les années 80 que le député-maire Jacques Médecin lance en lieu et place des terrains des CP un projet mégalomane d’hypermarché. Il y a déjà une grande surface de bonne taille dans l’immeuble en bordure de la rue Clément-Roassal voisine, mais ce n’est pas suffisant à ses yeux. Le scénario est simple, on chasse les CP et si besoin est, on supprime la ligne « que plus personne n’emprunte » (sic), c’est une vieille obsession du maire ! Mais finalement, le promoteur est chargé de financer un nouveau bâtiment, soit en retrait rue Alfred-Binet, soit au fin fond, au pied de la colline du Piol (ce sera ainsi la mort souhaitée assurée) afin de supprimer tous les passages à niveau qui perturbent les automobilistes. Bien entendu, il s’agit du strict minimum, car le bâtiment, conçu à la va-vite, ne pouvait être que provisoire.