L’achèvement des travaux de creusement de la ligne 15 Sud marque une étape dans le nouveau métro. Désormais, on installe les équipements de voie et de signalisation avant de remettre les clefs à la RATP chargée de la maintenance.
Le 20 décembre dernier, la machine Marina a percé le tympan du tunnel de la gare de Créteil-L’Échat. Rien de bien nouveau en Île-de-France tant la valse des tunneliers est presque devenue banale ces dernières années. Entre les différents chantiers, RER E, ligne 14, lignes 15, 16, 17 et 18, on a compté jusqu’à une dizaine de tunneliers à l’oeuvre simultanément aux quatre coins de la région. Pourtant, l’arrivée de Marina dans la boîte de la station Créteil-L’Échat, après une course de 2,6 km, marque la fin des creusements de la première ligne du Grand Paris Express. Ce projet qui a pris beaucoup de retard, décrié pour son coût, franchit ainsi une étape décisive après l’achèvement du creusement des 37 km de la ligne 15 Sud. Alors que le génie civil des gares est lui aussi quasiment terminé (avec les derniers travaux à Pont-de-Sèvres), plus rien ne s’oppose désormais à une mise en service fin 2025-début 2026 comme annoncé. Et ce n’est pas là un moindre exploit compte tenu de l’ampleur de ce chantier où une vingtaine de tunneliers aura creusé durant les 4 ans de forage. Désormais, on pose la voie, on soude les rails et on tire les câbles. La caténaire, rigide, est mise progressivement en place. Les premières rames du Metropolis d’Alstom version Grand Paris Express devraient sortir d’usine en 2022. Dès que l’infrastructure le permettra, les essais en ligne de ces trains de 108 m pourront commencer. Avant cela, la RATP aura pris possession de l’infrastructure. Alors que l’exploitant des nouvelles lignes sera désigné par appel d’offres, la loi a déjà confié la maintenance du réseau (et non du matériel) à la RATP. Cette désignation n’est pas sans soulever quelques questions. Certains candidats à l’exploitation considèrent que le jeu sera faussé dès lors que la maintenance ne sera pas de leur compétence. La RATP ne sera-telle pas avantagée en disposant déjà d’informations exclusives ?
Pour éviter d’être prise en défaut sur ce sujet hautement sensible, l’entreprise publique a pris les devants. La direction de la maintenance du GPE a quitté les locaux du siège quai de la Rapée pour un autre site. Dès lors, ces personnels ne pourront plus avoir de contact avec la RATP, qui reste pourtant leur entreprise. Une situation assez originale, destinée à garantir la neutralité du gestionnaire d’infrastructure vis-à-vis des candidats à l’exploitation. Pour autant, on peut déjà imaginer la réaction d’éventuels exploitants écartés si la RATP remporte ce marché.
Pour l’heure, une autre menace bien plus inquiétante plane toujours sur le nouveau métro. À trois ans et demi de sa mise en service, son exploitation n’est toujours pas financée. Si rien n’est décidé, c’est Île-de-France Mobilités qui devra seule en assumer la charge alors que les finances de l’autorité organisatrice sont au plus mal. La présidente de la région, Valérie Pécresse, s’est plusieurs fois exprimée sur le sujet, demandant une participation financière de l’État. Faute d’accord, il y a un fort risque que la charge en soit tout simplement reportée sur le voyageur. Alors que le montant du passe Navigo mensuel reste inchangé depuis plusieurs années à 75,20 euros, il pourrait bien connaître une importante hausse, frisant les 100 euros, pour compenser les nouvelles dépenses. Mais une telle mesure s’annonce très difficile à faire passer, même en réponse à une amélioration considérable de l’offre de transport. D’autant que la mise en service de la ligne 15 Sud devrait intervenir peu avant les élections régionales.
Cet article est tiré du n°294 de RAIL PASSION dont voici la couverture :