En Suisse, une course en montagne commence (et sâachĂšve) souvent par un voyage en train. Ici, câest du Martigny – ChĂątelard quâil sâagit. Pour un trajet jusquâaux MarĂ©cottes, suivi dâun parcours en minibus pour rejoindre le camping du Vent dâen Haut, point de dĂ©part dâune rando jusquâĂ lâauberge de Salanfe, aux pieds des dents du Midi.
Une envie de train, ça ne sâexplique pas. Ăa ne se retient pas. En fait, on peut y rĂ©sister. Dans lâabsolu. Et mĂȘme en pratique : on peut refuser dâentendre monter ce dĂ©sir impĂ©tueux du fond de nos tripes. Mais il convient de savoir comprendre que câest un appel intĂ©rieur⊠qui est aussi un appel supĂ©rieur. Et donc dây rĂ©pondre. Câest quasi systĂ©matiquement gĂ©nĂ©rateur dâun plaisir Ă la fois simple mais aussi intense, profond, subtil ou plus diffus⊠Et, quand bien mĂȘme cette Ă©motion serait brĂšve, il se passe quelque chose au fond du corps de particulier qui nâappartient quâau train et Ă cette envie de train. Ăa peut demander un long voyage ou un trĂšs court.
Jâai ressenti cette impulsion, ce besoin, alors que je me trouvais cĂŽtĂ© suisse, Ă quelques battements dâailes de choucas de la frontiĂšre française, non loin du mont Blanc. Dâune part, de nombreux kilomĂštres effectuĂ©s en voiture dont une partie sur de petites routes trĂšs Ă©troites (quand on a ce besoin permanent dâaller voir ce quâil y a dans les coins reculĂ©s) et finalement Ă©puisantes. Dâautre part, une ligne de chemin de fer croisĂ©e plusieurs fois avec ses trains diffĂ©rents de ceux que jâai lâhabitude de voir en France â une grande ligne, certes, mais aussi un parfum dâailleurs. Le stimulus avait commencĂ© Ă agir⊠La journĂ©e Ă©tait orageuse : parfaite pour prendre le temps de discuter. Alors, je discute avec les gens du cru. « ⊠Jâai Ă©tĂ© pris par une envie soudaine de train⊠» « De train ? » « Oui : de faire une excursion en utilisant le train. Je cherche des idĂ©es. » « Ici ? En Suisse ? » « Oui. En Suisse. Jâaimerais prendre un train local. Pour visiter de prĂ©fĂ©rence la rĂ©gion oĂč lâon est â câest-Ă -dire du cĂŽtĂ© massif du Mont-Blanc, le secteur des portes du Soleil⊠Dans cette rĂ©gion, la premiĂšre pensĂ©e qui vient Ă lâesprit, câest Chamonix-train du Montenvers, cĂŽtĂ© France, donc. En tant que Français, on sait â enfin : plus ou moins â quâil existe des trains en Suisse, et plus particuliĂšrement dans le Valais, qui desservent des stations en montagne. Je cherche un petit truc original, bien local⊠» De quelques Ă©changes, je retiens lâexcursion au lac de Salanfe. Excursion qui demande de prendre le train au dĂ©part de Martigny (1), puis un bus qui assure la continuitĂ© avec le train et, enfin, dâeffectuer une rando pas trĂšs exigeante. Cela, pour le lendemain. On verra comment ça se passe quand ça correspond Ă une impulsion.
Pour tout dire : il est possible de se rendre au bout de la route en voiture. Il sây trouve dâailleurs un camping. Mais cela impose de prendre sur plusieurs kilomĂštres une route trĂšs Ă©troite (de montagne, faut-il le rappeler ?) oĂč croiser est quasi impossible dâun bout Ă lâautre â et, sur ce plan jâai dĂ©jĂ bien donnĂ©. Et puis, outre le surplus de fatigue et de tension Ă©pargnĂ©, je suis pour tout ce qui peut aider Ă conforter les dessertes par train. Par ailleurs, la desserte â jâai obtenu une fiche des horaires Ă un office de tourisme dâun village local â est suffisamment importante pour garantir un voyage sans prĂ©cipitation : un train quitte Martigny toutes les heures ou presque Ă partir de 6 h du matin ; mĂȘme chose pour les retours â jusquâaux alentours de minuit. Dans mon cas, il convient dâajouter une demi-heure de route depuis mon logement⊠Et de ne pas nĂ©gliger le fait que je repars le lendemain. Il serait donc bien dâĂ©viter lâun des derniers trains mais aussi de profiter de la journĂ©e. Est-ce quâen mây prenant en derniĂšre minute au cĆur de lâĂ©tĂ©, cela pourrait sâavĂ©rer difficile ?