Avec l’e 320, le matériel Eurostar effectue un saut générationnel par rapport aux rames d’origine. Nous partageons les impressions en cabine d’un conducteur du pool qui nous permet de découvrir les procédures spécifiques à cette relation internationale.
Mardi 21 février 2017. Le rendez- vous est donné à la mezzanine d’embarquement pour Eurostar en gare de Paris-Nord. Aucun passe-droit pour Rail Passion. Direction la douane et le contrôle des bagages. Puis sans attendre le lancement de l’embarquement des voyageurs du train 9015, départ 9 h 13, avec Laurent Morel, « traction inspector » (l’équivalent du chef de traction français), nous gagnons le quai de la voie 3 où stationne la rame Siemens 4011/12. Nous y retrouvons Jean-Théo Lorrain qui sera le « driver » (conducteur) de ce voyage. Conducteur français de l’unité de production de Paris-Nord, il fait partie du pool de conducteurs SNCF détachés à Eurostar. Sur les 200 agents de conduite du roulement Eurostar, il y a environ 100 conducteurs français, 80 anglais et 20 belges. Dans ce pool distinct de la SNCF, les conducteurs ont une licence Eurostar avec son propre certificat de sécurité. L’équipage comporte un agent commercial appelé TM 1, par ailleurs chef d’orchestre en cas d’évacuation, et un agent TM 2, conducteur, qui assure un rôle commercial avec le TM 1 sauf dans le tunnel, où il est alors présent en cabine arrière. Avant chaque départ, l’équipe fait un débriefing de ce voyage, la desserte, les horaires, les particularités éventuelles et le taux de remplissage. Car on sait tout grâce à la réservation. Le 9015 va transporter 768 voyageurs au départ de Paris pour une capacité globale de 892 (86 %) dont 595 en formule Standard et 100 en Standard Premier. Quant au prestataire de restauration, l’entreprise Cremonini, son équipe comprend deux agents de bar et deux chefs de cabine.
En attendant l’heure de départ, Jean-Théo Lorrain nous fait une visite de cette cabine spacieuse, où le conducteur occupe une position centrale. On reconnaît bien la patte de Siemens avec un pupitre circulaire. De la gauche vers la droite. Prises de courant aux normes anglaises et françaises : les rames TMST sont en cours de modification. Radio portable de la concession Eurotunnel. Radio sol-train de première génération, désormais hors service et dont les rames neuves au-delà de la 4021/22 ne seront pas équipées. Boutons de fermeture des portes et retrait marchepieds avec contrôle sur écran. Boutons de frein de stationnement et commande des trappes de nez. Au dessus, équipement de signalisation belge TBL 2. Quatre écrans dont les deux extrêmes sont identiques : frein, traction, carnet de bord, visualisation des portes. Deux écrans centraux pour la vitesse et ERTMS. Boutons d’armement du Cab-Signal. Visualisateur KVB à droite, pas vraiment dans le camp de vision directe du conducteur. En dessous, radio soltrain, GSM-R, la clé de la boîte à leviers. Commande du signal d’alerte lumineux. Manomètres de frein (secours). Commande essuie-glace. Combiné radio.
Sur le pupitre, présence de boutons d’éclairage, klaxon et sablage. Inverseur de marche. Commande de frein à droite et commande de traction à gauche. Commande de la consigne de vitesse imposée, des pantographes et du disjoncteur. Bouton d’acquittement des signaux. Et plus étonnant, présence d’un masque respiratoire. Dans le couloir menant à l’espace voyageurs, plusieurs armoires renferment des microdisjoncteurs et, plus étonnant, une bouteille d’air comprimé à 200 bars pour l’ouverture de secours des trappes de nez. Et, sur un compteur inattendu sur du matériel ferroviaire en France, voici le kilométrage parcouru par cette rame à ce jour : 474 289 km. L’heure du départ approche. Nous sommes au pied du carré 103 dont les feux ont été inclinés sur cette voie 3 qui est la plus courte. Et pour une rame de 398,920 m… plus longue de 5,20 m que les TMST (les Eurostar de première génération). Il faut un peu se tordre le cou pour voir la couleur des feux. Dans l’autre sens, pour aller au plus près des heurtoirs, des miroirs ont été installés… comme à Paris-Saint- Lazare lors de l’arrivée du Francilien, pourtant ramené à sept