Commandées dans les années 70 pour prendre le relais de la traction vapeur finissante, ces deux séries, par-delà leurs différences – les BB 67400 étaient polyvalentes, les 218 n’ont officié qu’en service voyageurs –, auront eu finalement des trajectoires assez comparables. En effet, après une première partie de carrière brillante, leur traction diesel leur permettant d’aller presque partout, elles ont vu leur rayon d’action régresser au fur et à mesure que les électrifications progressaient des deux côtés du Rhin. L’ascension des rames automotrices, plus faciles à gérer que les rames tractées, a fait le reste et aujourd’hui l’une et l’autre série sont au crépuscule de leur vie bien remplie.
Ces deux importantes séries de locomotives thermiques, totalisant plus de 600 engins, présentent pas mal d’analogies. Nées dans la décennie 1970 pour remplacer définitivement la traction vapeur de part et d’autre du Rhin, elles sont couplables, aptes à la réversibilité, limitées à 140 km/h et d’une puissance assez semblable. Si les 218 ont toujours été spécialisées au trafic voyageurs national et régional en Allemagne de l’Ouest, les 67400 ont eu une carrière plus large, allant des rapides et express aux TER, en passant par les convois de messageries et marchandises sur le territoire hexagonal.
Dans l’un et l’autre cas, leur diffusion géographique a été très large, allant des rives de la Baltique aux Alpes bavaroises, de la Ruhr à la Basse-Saxe, du Nord-Pas-de-Calais à la Côte Vermeille, de la Bretagne à l’Alsace, de la Normandie à l’Auvergne et de l’Aquitaine aux Savoies.
Les premières ont affronté les rampes de 50 ‰ de la Forêt-Noire conduisant de Rastatt à Freudenstadt, les secondes celles de 35 ‰ menant au Mont-Dore.
Voguant vers les 50 ans de carrière, toutes deux auront assuré un service varié souvent très dur. Leur élimination démarrée au début des années 2000 se poursuit activement. Sur la DB comme sur la SNCF, outre les électrifications, leur éviction a été largement favorisée par la prolifération des rames automotrices diesels, plus maniables en service voyageurs régional que les rames tractées.
Au 1er novembre écoulé, l’inventaire DB, sévèrement écrémé, ne reprenait plus que 98 engins au parc soit le quart de la série. Côté SNCF, le parc 67400 est tombé à 108 unités légèrement en dessous de la barre de 50 % du total construit. Pour le proche avenir ces chiffres vont en toute logique continuer à s’abaisser.
218 DB : des machines passe-partout en service voyageurs
Dans la catégorie des machines thermiques de ligne, la DB s’était illustrée dès le milieu des années 50 avec ses séries racées de V 200, futures 220 et 221 de type CC, puissantes et véloces. Elle devançait alors largement la SNCF, qui timidement ne sortait ses 060 DB qu’en 1957. Puis, poursuivant l’élimination de la traction vapeur, elle avait acquis à partir de 1965 les V 160 (216) et les 215 de type BB, toutes pourvues d’une chaudière vapeur, utile pour assurer le trafic voyageurs. Après la série réduite des V 162 (217) de 1 415 kW, limitée à 15 engins, chauffant électriquement les rames voyageurs, le réseau acquiert un premier lot de 12 machines de la série 218, toujours avec transmission hydraulique, plus puissantes grâce à leur moteur MTU MA 12 VTB 10 de 1 840 kW et à même de rouler à 140 km/h. Affectées en 1968 dans les Bw de Hagen Eckesey et Ratisbonne, elles vont donner toute satisfaction à l’exploitant.
Au vu de leur comportement, la DB va passer commande au consortium germanique Krauss-Maffei, Henschel et Krupp de 398 machines au terme de quatre commandes successives (218.101-170, 171-298, 299-398, 400-499), disposant d’une motorisation différente panachée selon les tranches numériques :
– MTU MA 12 V 18 TB 10 de 1 840 kW pour les 218.101-194, 242-288 ;
– MTU MA 12 V 18 TB 11 de 2 061 kW pour les 218.198-241, 289-322, 340-398, 400-426, 435-455, 463-484 ;
– Pielstick 16 PA 4 V 200 de 2 061 kW, de conception française, analogue à ceux montés sur les BB 67400 SNCF, réglés à 1 765 kW, pour les 218.195-197, 323-339, 427-434, 456-462, 485-499.
Toutes ces machines étant couplables entre elles.
La livraison débute en 1971 à un rythme élevé avec affectation des 218.101-125 à Flensbourg sur la BD Hambourg, 136-146 à Hagen Eckesey sur la BD Wuppertal. Les deux années suivantes, 204 engins sont en service avec la répartition suivante :
– BD Hambourg, 48 à Flensbourg, 25 à Hambourg Altona ;
– BD Wuppertal, 20 à Hagen Eckesey ;
– BD Sarrebruck, 12 à Kaiserslautern ;
– BD Ratisbonne, 31 à Ratisbonne ;
– BD Munich, 33 à Kempten et 26 à Mühldorf.
Les livraisons se poursuivront jusqu’en 1979, où les Bw de Karlsruhe et Lübeck recevront la queue de commande constituée par les 218.476-484 dans l’un et 218.485-499 dans l’autre. Elles sont alors affectées dans 10 cantonnements du territoire DB à Flensbourg, Lübeck, Hagen Eckesey, Krefeld, Kaiserslautern, Karlsruhe, Haltingen, Ratisbonne, Mühldorf, Kempten, ce dernier ayant reçu en priorité les machines les plus puissantes de la cavalerie vu les rampes de son étoile montagneuse. Ayant chassé en régime voyageurs les grosses pointures 220, 221 et les 215, 216, handicapées par leur chauffage vapeur, les 218 font la loi sur les trains rapides et express intérieurs et internationaux sur les itinéraires non encore électrifiés, cas du Schleswig-Holstein, de la Rhénanie-Palatinat, de la Basse-Saxe, du Bade-Wurtemberg, de la Bavière.