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laviedurail.com

Les Engerth ardennaises, pionnières de la sidérurgie moderne dans le bassin de Longwy

10 juillet 2012
- -

Photos du dossier sur le lien ci-contre: http://vdr.elteg.info/011100-97-Les-Engerth-de-l-Est-des-vapeurs-ardennaises-au-service-de-l-industrie.html

Le point de départ de cette épopée est constitué par une découverte
qui va avoir un retentissement considérable. Deux ingénieurs anglais,
Sydney Thomas et Percy Gilchrist, découvrent en 1878 un procédé qui
permet désormais la transformation de la « minette » lorraine en acier
de qualité (7). Les gisements de « minette » sont connus depuis les
premiers temps de la métallurgie ; on en trouve en affleurements
abondants sur la lisière frontalière belgo-luxembourgeoise de Gorcy à
Villerupt, et son extraction en est aisée par « minières » ou galeries
foncées à flanc de coteau.
Au début du xixe siècle, des maîtres de
forges (les Labbé, d’Huart, de Saintignon…) exploitent ce minerai
médiocre à forte teneur phosphoreuse avec en moyenne 33 % de fer pur. Ce
minerai n’est transformable qu’en fonte de moulage ou d’affinage.
Après
la découverte de la machine à vapeur, première révolution industrielle,
le procédé de Thomas Gilchrist est quasiment une seconde révolution
industrielle, qui va faire de la Lorraine la région phare de production
de l’acier national durant un siècle… Le 1er juin 1880 est fondée la
Société des aciéries de Longwy. La première coulée d’acier Thomas a lieu
le 19 février 1883 à l’usine Labbé de Mont-Saint-Martin. Dans ce
sillage, d’autres maîtres de forges et capitaines d’industrie
développent de nouvelles installations durant les décennies 1880-1890 :
Senelle-Maubeuge, Hauts Fourneaux de la Chiers à Longwy, la Providence
à Réhon, Raty à Saulnes, Société d’Aubrives et Villerupt à Villerupt…
Parmi les premiers « aciéristes » de Longwy et de Mont-Saint-Martin, des
Ardennais ; les maîtres de forges lorrains, connaissant la tradition
séculaire des Ardennes du travail des métaux et le savoir-faire de ses
ouvriers, vont implanter dans le département durant les décennies à
venir nombre de leurs succursales de transformation à Sedan, Blagny,
Brévilly, Flize, Messempré, Monthermé-Laval-Dieu, Vireux, Aubrives… Les
demi-produits – billettes, largets, coils, feuillards, fil machine,
gueuses de fonte – sont destinés aussi aux entreprises de fonderie,
forges et estampages, et à toutes les « boutiques » de nos vallées
industrielles ardennaises… Le minerai est pour le moment consommé par
les hauts-fourneaux à proximité, à Longwy, Mont-Saint-Martin, Moulaine,
Saulnes, Villerupt… Mais une demande extérieure émerge depuis les usines
de l’Escaut (Denain, Valenciennes) et de la Belgique. Pour la
production d’acier, il faut de la houille, du coke, de la castine.
Ensuite, produits finis et demi-produits doivent être transportés (même
les scories des aciéries Thomas produisent un excellent engrais pour
l’agriculture)… Toute cette activité qui se développe génèrede tels
courants de transport de pondéreux que l’essentiel des commandes
massives d’engins construits par la Compagnie de l’Est de 1881 à 1886 va
concerner des locomotives 0.500 Engerth (n° 0.564 à 0.691) et livrées
de Mohon, Longuyon et Verdun.
Depuis Longuyon à Charleville et
Givet-Frontière, où les déclivités de la ligne ne dépassent pas 5 ‰,
elles remorquent des trains de 750 t à 30-35 km/h. Mais au-delà de
Charleville, par la seule liaison existante vers le nord, via Rimogne et
Auvillers, la longue rampe du Tremblois à 15 ‰ est un rude obstacle à
franchir. Remaniés aux faisceaux de Mohon, les trains doivent être
réduits à la charge de 350 t. Dès lors, les industriels du bassin de
Longwy qui s’approvisionnaient en houille et en coke sidérurgique
depuis la Sarre décident de se fournir dans le bassin de
Douai-Valenciennes. Dans l’urgence, la Compagnie de l’Est fait étudier
et construire un itinéraire Charleville – Hirson au profil moins sévère ;
une variante à l’itinéraire primitif est mise en service en mai 1884
de Tournes à Auvillers par la vallée de la Sormonne ; désigné «
déviation » de Laval-Morency, ce nouveau tracé est parcouru par les
seuls trains lourds en transit, car les déclivités n’excèdent pas 8 ‰ et
les Engerth de Mohon admettent 500 t de charge jusque et depuis Hirson
(voir encadré page 20).
Dans le prolongement de la nouvelle «
déviation » de Laval-Morency, la ligne est mise à double voie
d’Auvillers à Hirson. L’itinéraire primitif par Rimogne, dit « voie
ordinaire », est conservé pour le service voyageurs et les dessertes
marchandises locales.
Autre événement ferroviaire de ces années
1880, en décembre 1885 l’itinéraire de rocade nord – sud-est Hirson –
Amagne – Revigny (ligne 6 Est) est ouvert dans sa totalité. À cette
occasion, le dépôt d’Amagne va se voir affecter des Engerth ; cette
ligne 6 (des considérations militaires stratégiques ont présidé à sa
naissance) va être équipée de la double voie et son cantonnement, assuré
par électrosémaphores. La Compagnie de l’Est met à profit cet
itinéraire performant pour écouler en transit les courants de transport
de la relation nord – sud-est Hirson à Is-sur-Tille. Le dépôt d’Amagne,
ouvert en 1883, exerce l’essentiel de son activité dans des prestations
de traction sur cet itinéraire. Les Engerth d’Amagne assurent ainsi le
service marchandises de transit vers et depuis Hirson et Revigny. Sur la
partie occidentale de la ligne 6, elles doivent affronter, en sens
impair, une rampe de 16 km à partir de Wasigny-la-Neuville et, excepté
deux paliers en gares de Draize-la-Romagne et Montmeillant-Saint-Jean,
la rampe est continue à 10 ‰ et culmine dans le souterrain des Hénaux,
près de Liart.
Revenons à l’essor de ces décennies 1880-1890 dans nos
régions laborieuses du Nord-Est. Certes, il est impressionnant, mais
ce n’est qu’un avant-goût de ce qui va se produire ultérieurement.
Après 1880, des recherches géologiques ont mis en évidence que le
gisement superficiel de la région frontalière Longwy-Villerupt
s’incline fortement et s’enfonce en couches de plus en plus abondantes
vers le sud-est, dans la région de Briey, un gisement qu’on ne parvient
pas à quantifier tant il semble inépuisable (heureusement que les
Allemands n’en eurent pas connaissance au moment du traité de Francfort,
en 1871). Mais ces ressources ne peuvent être exploitées que par puits
foncés. À partir de 1886, des dizaines de concessions sont attribuées,
et la région va voir surgir les chevalements des sièges d’extraction :
1896, Jœuf, 1898, Homécourt, 1901, Auboué, 1902, Moutiers, 1903, Sancy,
Piennes (le pays des footballeurs Piantoni et Platini : leurs pères et
grands-pères étaient mineurs dans ces cités, ces « Petites Italie »,
nommées ainsi du fait de l’apport essentiel de la main-d’œuvre de fond
d’origine transalpine), 1906, Landres, 1908, Jarny, Joudreville, 1909,
Valleroy, Bouligny (où mon père naît dans la cité ouvrière du puits
d’Amermont…), 1910, Mancieulles, Droitaumont, Piennes-la-Mourière,
Murville-Mont-Bonvillers… Un bouleversement considérable dans ces
campagnes tranquilles de Lorraine. Le souvenir de la guerre de 1870-1871
est encore vif, nombre de familles ont encore des leurs de « l’autre
côté », dans la partie annexée par les Allemands ; le climat patriotique
est très fervent, on se promet « la revanche » et tous les ans on
célèbre, à Mars-la-Tour, le sacrifice des cuirassiers terrassés à
Gravelotte, à Rezonville… Ces lieux de mémoire sont à quelques
kilomètres de ce maelström économique qu’accompagnent de fortes
migrations de population étrangère (des Belges, des Polonais et surtout
des Italiens, qui vont constituer le gros du personnel de fond des
nouveaux puits, mais aussi dans le « vieux » bassin minier de
Hussigny-Villerupt). Patronat et pouvoirs publics, dépassés, tardent à
mettre des structures d’accueil dignes pour cette main-d’œuvre et leurs
familles. Cette population est hébergée de manière précaire dans des
baraquements, et elle « cantine » un peu partout aux abords des puits de
mines. Dans cette région sensible où règne un certain climat
d’espionnite, un commissariat spécial est implanté à Longwy pour
surveiller tous ces « étrangers bruyants » aux coutumes bien différentes
de celles des paisibles laboureurs locaux. De cette situation naît un
mouvement social vigoureux, qui aura pour point d’orgue une grève très
dure (1905) des mineurs de Hussigny-Thil-Villerupt, que ces derniers
tentent d’élargir aux métallurgistes de tout le bassin de Longwy.
Immense frayeur des maîtres de forges, qui vont en tirer des
enseignements pour l’avenir. Toute cette période intense, exaltante et
confuse à la fois, ce « nouvel horizon », fera écrire à Gérard Noiriel,
universitaire et historien incontournable de la métallurgie et du monde
du travail : « À cette époque les régions de Briey, Longwy et la zone
frontière, c’était comme un véritable “Far West”. » Nous voilà
apparemment loin de notre sujet… Pourtant, la logistique de transport
ferroviaire doit s’adapter à ce « big bang ». Les sièges de mines sont
désormais éloignés des usines de transformation, et la demande en
minerai s’élargit : au sud, les Hauts-Fourneaux de Pont-à-Mousson, les
Aciéries de Pompey (qui ont fourni l’acier de la tour Eiffel) ; au nord,
la sidérurgie belge et luxembourgeoise ; au nord-ouest, les bassins
industriels de l’Escaut (Valenciennes, Denain, Lourches…), de la Sambre
(Maubeuge-Louvroil, Hautmont…). Le défi à relever est considérable.
Toutes les adaptations sont décidées certes en conseil d’administration
et dans les bureaux d’études des services centraux de la Compagnie de
l’Est, au 23, rue d’Alsace à Paris, mais c’est depuis Charleville que
vont être encadrés et affinés tous les projets de travaux. Charleville
est déjà le siège des arrondissements administratifs qui recouvrent
l’organisation des chemins de fer de l’Est dans les Ardennes et la
partie nord des départements de la Meuse et de la Meurthe-et-Moselle,
dont ce « bassin » de Longwy-Briey (8). Une structure du service de la
Voie, division des études et travaux, est créée dans un immeuble de
l’avenue Forest à Charleville (9). Depuis Charleville, ses bureaux
d’ingénieurs et leurs planches à dessin vont aboutir à ces travaux
pharaoniques de la décade 1900. 1902 : mise à double voie de la ligne 11
Est, Longuyon – Pagny-sur-Moselle ; décembre 1906 : mise en service du
nouvel itinéraire Charleville – Hirson par Rouvroy, Liart – ligne 31
Est, itinéraire à double voie, cantonnement par électrosémaphore, les
déclivités ne dépassant pas 8,5 ‰ (à l’époque, la zone de
Charleville-Mohon et la ligne de Hirson par la « déviation » de
Laval-Morency sont complètement saturées) ; 1906-1907 : ouverture des
lignes Baroncourt – Audun-le-Roman et Valleroy-Audun – Villerupt,
permettant la desserte des carreaux des nouvelles mines de fer ;
1908-1909 : implantation d’une grande gare de triage régulatrice à
Nouvion-Lumes, tandis que s’élèvent trois nouveaux dépôts de
locomotives, à l’architecture commune, à Conflans-Jarny (une rotonde), à
Lumes (une rotonde), à Mohon (deux rotondes jumelées) (10). Tout cela
s’accompagne de la construction de grands faisceaux d’attente dans les
gares de concentration de mines (Conflans, Baroncourt,
Audun-le-Roman…), de raccordements directs à certaines bifurcations
(Longuyon, Écouviez…), et de voies d’évitement-circulation dans
plusieurs gares de Longuyon à Hirson.
Les Engerth à la peine… et à l’honneur
Et nos braves Engerth ? C’est leur chant du cygne. Ce sont elles qui
vont assurer, au tout début du xxe siècle, des trains dont le nombre va
en faire une véritable noria. Mais ce n’est plus tenable avec leur
charge limitée à 750 t sur les sections de ligne les plus faciles et
cette rupture de charge qui abaisse le tonnage des trains à 450 t
au-delà de Charleville vers Hirson. Depuis la sortie de construction des
dernières Engerth, en 1886, les progrès techniques en matière de
locomotive à vapeur ont été considérables, notamment avec l’apparition
du moteur compound (11) ; en outre, une avancée révolutionnaire en
matière de thermodynamique avait lieu aux Chemins de fer prussiens, en
Allemagne, avec la « surchauffe » (12). Ces progrès étaient nécessaires
avec l’élévation générale du tonnage des trains de toute nature.
Concernant le transport de pondéreux, vont apparaître les
wagons-tombereaux à charge unitaire de 15 t, puis 20 t et même 40 t avec
les premiers grands wagons minéraliers à trémie. C’est dans cet
environnement que voient le jour, en 1902, deux locomotives prototypes
au dépôt de Longuyon ; elles reproduisent une locomotive type 140 –
compound à quatre cylindres – étudiée par la Société alsacienne et
remise quelques mois auparavant à la Compagnie du Midi pour le service
difficile de la ligne des Causses, de Béziers à Neussargues. Numérotées
Est 4001 et 4002, ces deux locomotives effectuent des essais
d’endurance de Longuyon à Hirson ainsi que sur la section de Longwy à
Villerupt, qui présente la rampe la plus sévère dans l’est de la France
(23 ‰). Elles seront la tête de série de 173 locomotives 4000 qui
sortiront de construction de 1905 à 1912 – n° Est 4003 à 4175 (série
12). Les premières livrées (4003 à 4070), de 1905 à 1909, sont affectées
aux dépôts de Mohon, Longuyon et Amagne. Ce sont désormais les 4000 qui
relèvent les vieilles Engerth. Elles vont assurer un service sans
défaillance, en dépit de quelques défauts de vaporisation qui les feront
surnommer par leurs équipiers les « dures au gaz ». Au départ des
nouvelles gares de concentration de mines de Baroncourt et
Audun-le-Roman, au départ des faisceaux de Longwy-Mont-Saint-Martin, ces
4000 remorquent des trains de 1 450 t jusqu’à Lumes et
Givet-Frontière, avec toujours une « rupture de charge » au-delà de
Charleville vers Hirson, la charge étant réduite à 950 t. C’est le
double des performances des Engerth. Avec ces progrès et tous les
travaux d’aménagement évoqués, cet itinéraire de rocade Longuyon –
Hirson sera, en 1913, la ligne au tonnage kilométrique transporté (TKT)
le plus élevé du monde… La légendaire artère nord-est était née.
Jusqu’à
leur déclin, les Engerth auront remorqué les trains les plus lourds de
leur époque, et ce, sans le frein continu à air agissant sur le train.
Le freinage, tant pour l’arrêt que pour la dérive dans les pentes, était
assuré par des « freins à vis gardés », répartis dans le corps du
train. Le chef de train, dans son fourgon de tête derrière la machine,
puis un, deux, trois agents (selon le tonnage) occupant des vigies
hautes sur des wagons équipés, enfin le « conducteur d’arrière », chargé
du « frein à vis de queue » et de la « protection arrière » (13) : ces
agents actionnaient leur frein à vis selon un code donné au sifflet de
la locomotive par le mécanicien.
Dans les pentes parsemant les
itinéraires empruntés, avec 25, 30, 35 petits tombereaux de minerai
derrière la loco, le mécanicien d’une Engerth (et d’une 4000 durant
leurs premières années) contenait l’allure de son train par la marche à
contre-vapeur. On parlait alors de « battre la vapeur »… Par une vanne
depuis le poste de conduite, le mécanicien admettait de l’eau dans les
conduits d’échappement et renversait le levier de marche au premier cran
arrière – d’où l’expression « renverser la vapeur » – puis ouvrait le
régulateur « en grand » (admission maximale de vapeur) et variait le
levier de marche en s’éloignant du point mort selon la résistance à
l’avancement du train à obtenir dans la pente ; enfin, il réglait
l’arrivée d’eau, eau qui s’échauffait dans les tiroirs de distribution
et les cylindres ; l’eau se transformait en vapeur humide qui s’évacuait
à la cheminée par un petit panache à jet continu (un crachement d’eau
prononcé à la cheminée était l’indice d’un mauvais réglage de la vanne
d’admission d’eau chaude).
Temps héroïques de nos grands aînés de la
traction vapeur, avec ces conditions précaires de freinage, sur une
plate-forme ouverte aux quatre vents (un abri sommaire n’équipera les
Engerth qu’à partir de 1894), avec des 11, 12, 13 « heures de machine »
dans le froid, la pluie, la neige, le brouillard givrant, du mauvais
charbon dans la soute, à lutter contre les éléments avant de prendre un
repos spartiate sur un bat-flanc dans un « corps de garde » à Longwy, à
Hirson ou à Revigny… Il a fallu attendre la généralisation du frein
continu à air Westinghouse sur les wagons à marchandises, dans les
années 1928-1929, pour que les quelques dizaines d’Engerth encore en
service en soient équipées, ainsi que de sa commande (air fourni par
l’installation d’un compresseur Fives-Lille à double phase – commande du
frein par « robinet du mécanicien » n° 4).
À la veille de la Grande
Guerre, la quasi-totalité des Engerth est encore à l’effectif. Les
livraisons massives des 4000 permettent d’en muter dans nombre de dépôts
Est sur des services plus faciles, à Noisy-le-Sec, à Chaumont, à
Troyes, à Châlons, à Chalindrey… Toutefois, une quarantaine d’Engerth
restent pensionnaires des dépôts de Mohon et Amagne pour le service des
trains de marchandises locaux. Devant la menace de l’invasion
allemande, à l’été 1914, ces machines sont repliées sur les dépôts cités
précédemment ; les qualités de l’Engerth retiennent l’attention de
l’état-major, qui en réquisitionne avec affectation en « service spécial
» dans les dépôts provisoires implantés dans les gares et faisceaux
militaires de concentration – dites « gares régulatrices », telles que
Brienne-le-Château, Saint-Dizier, Connantre. Sur les fronts de combat de
Champagne et d’Argonne, si les Engerth ne sont pas « en première ligne
», elles sont en « deuxième ligne ». 21 février 1916, 7 h 15 : un
déluge de feu tombe sur le bois des Caures, tenu par les chasseurs des
56 et 59e BCP du lieutenant-colonel Driant. La plus grande bataille de
tous les temps a commencé… Verdun.
Les lignes ferroviaires desservant
Verdun sont pratiquement toutes interceptées, l’accès par le sud est
impossible, le « saillant » de Saint-Mihiel, occupé par l’ennemi dès les
premiers mois de la guerre, verrouille la ligne 19 Lérouville – Sedan.
La ligne 4 Châlons – Verdun – Conflans est à portée des canons
allemands après Aubréville. Malgré tout, des trains empruntent cette
ligne la nuit… Des Engerth et leurs héroïques équipiers acheminent des
trains, une bâche déployée sur l’abri de la loco pour dissimuler aux
artilleurs les lueurs du foyer lors des « mises au feu ». Dans un
premier temps, la logistique colossale pour soutenir Verdun va passer
par la noria de la légendaire Voie sacrée et le petit train à voie
étroite du « Réseau meusien » depuis Bar-le-Duc et Revigny. Pour
renforcer les moyens du champ de bataille, une ligne à voie normale de
57 km va être construite en un temps record par les territoriaux et des
travailleurs annamites. Embranchée sur la ligne 6 Est Hirson-Revigny à
Sommeilles-Nettancourt, elle va déboucher au sud de Verdun à Dugny, sur
la ligne 19. Cesont encore des Engerth qui vont assurer la remorque des
trains militaires de toute nature depuis Châlons et Revigny par cette
ligne militaire, la « 6 bis ».
Après l’armistice, elles vont
retrouver leurs services classiques, mais une vingtaine d’Engerth vont
être détachées pour un service de trains de travaux au titre du MRL
(ministère des Régions libérées) dans le cadre de la reconstruction des
villes, villages et infrastructures des régions dévastées de Champagne
et d’Argonne. Elles sont affectées dans de petits postes de traction,
tels Sainte-Menehould, Challerange, Saint-Hilaire-au-Temple.



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