Un jour, un train, une photo… Ou, à défaut, une envie de photo… Qui n’a pas déjà éprouvé, ne serait-ce qu’une fois dans sa vie de ferroviphile, le sentiment d’être l’heureux témoin oculaire d’un instant de la scène ferroviaire qu’il aurait aimé voir immortalisé ?
L’étrange alchimie qui va sublimer le simple instantané d’un paysage soudain traversé par un train en une ambiance absolument unique, obéit sans doute aux lois du hasard. Pourtant, le photographe ferroviaire passionné et confirmé ne laisse généralement rien à ce dernier. Il a préalablement repéré les bons « spots », leur meilleure période d’éclairement, et il a bien sûr récupéré les horaires de passage des circulations qu’il espère pouvoir « shooter ». Souvent, dès son arrivée sur les lieux – qui a pu d’ailleurs nécessiter un peu de crapahutage –, sa journée commence par l’exécution du même rituel: armé d’un sécateur, il va élaguer, autour de son périmètre, les herbes et branchages qui pourraient entraver son action. Puis commence pour lui la longue et silencieuse attente… Mais, parfois, les choses peuvent aussi se précipiter. En cabine, il nous arrive de temps à autre d’observer des photographes qui veulent traquer un même train à plusieurs endroits, sautant dans leur voiture dès le cliché « dans la boîte » pour rattraper ledit train et le devancer de quelques instants à l’endroit suivant. C’est ainsi qu’au détour d’une courbe, de bon matin, on découvre une première fois l’un d’eux, perché sur un grand escabeau.
Une dizaine de kilomètres plus loin, après passage sous un petit pont, revoilà le même photographe, toujours perché sur le même escabeau. Dans un tel paysage et sous cette incroyable lumière matinale, sa photo a dû être magnifique… Encore une dizaine de kilomètres plus loin, et nous le surprenons à nouveau, cette fois dans une verte prairie, en bordure de la voie ferrée. Mais là, il court éperdument à notre rencontre, entravé par le trop lourd escabeau qu’il doit porter. Trop tard pour tranquillement se poser, cadrer, et déclencher! La vie de photographe ferroviaire n’est pas toujours de tout repos…
C’est pourquoi, dans ce numéro 300, Rail Passion a voulu mettre à l’honneur ses collaborateurs qui prennent des photos. En leur demandant de choisir l’une des leurs qui leur tiendrait particulièrement à cœur. Ce n’est pas forcément la plus belle de leur collection, mais l’une de celles qui leur parlent le plus. Et ils nous disent pour quelle raison…
À mon humble avis, il y a dans toute l’atmosphère ferroviaire une attraction permanente quasi magique que seuls les photographes, les peintres et les poètes ferroviphiles peuvent identifier au mieux sa vraie nature incomparable.
Descendez au long de la voie ferrée chers/chères photographes ferroviaires! Comme vous le savez bien, cela vaut toujours la peine, même si vous ne voyez pas de train, de vous rendre au bord des rails. Vous pouvez constamment profiter du réconfort spirituel, du calme absolu, de la brise rafraîchissante (ou glaciale) et de votre espoir éternel d’entendre un klaxon d’un train lointain. Quelle super ambiance! Train ou pas train, ça fait sûrement du bien d’attendre, de réfléchir, de redimensionner la photo qu’on aimerait prendre.